Maison passive et chauffage (Partie 1)

On présente souvent une maison passive comme une maison sans chauffage, notamment à des fins marketing. C’est évidemment faux et cela montre surtout une méconnaissance du fonctionnement d’une maison passive.

L’objectif initial des maisons passives

Je vous rappelle l’objectif que le PHI s’est donné en mettant au point le principe de maisons passives : supprimer le chauffage central, qui n’est pas très efficace et surtout très consommateur d’énergie.

Et ceci, en :

  • Minimisant les pertes
  • Maximisant les apports passifs
 

Les apports passifs sont de plusieurs types. Le principal est évidemment l’apport solaire, la plus grande source d’apport calorifique dans une maison passive.

Vous avez ensuite :

  • Les apports générés par les habitants eux-mêmes, de l’ordre de 80 watts par habitant
  • Les déperditions des appareils électriques, de cuisson, de production d’eau chaude, les douches, etc.
 

Ces apports sont suffisants une grande partie du temps. Mais dans certaines situations, ils ne seront pas suffisants.

D’ailleurs, l’objectif principal théorique à atteindre est une consommation de chauffage de l’ordre de 15 kWh/m²/an.

Ce n’est pas zéro. Il y a donc nécessairement un apport très faible mais réel, généralement calculé à une puissance d’environ 10 W/m², soit l’équivalent d’un petit radiateur électrique pour une maison standard.

La pratique dans une maison passive

En pratique, à quoi cela ressemble ?

Quand on interroge les habitants d’une maison passive, ils vous disent qu’ils utilisent très peu leurs moyens de chauffage, et surtout bien en dessous de ce qui était théoriquement calculé.

Pour expliquer ces différences, il y a trois pistes :

  • Le PHPP, le logiciel de calcul, est conçu avec une rigueur sans concession. Il aurait tendance à surestimer les besoins de chauffage. Ce n’est pas tout à fait vrai, mais il est organisé pour prendre en compte les paramètres les plus défavorables.
 
  • Une maison passive a une très bonne constante de temps. Elle ne perd que très lentement sa chaleur, même sans apport. Une bonne valeur est de l’ordre de 200 heures, soit 8 jours pour diviser par deux l’écart de température avec l’extérieur.
 
  • Le confort subjectif : on sous-estime l’utilisation du chauffage à cause d’un biais cognitif. Le cerveau veut prouver qu’on a fait le bon choix.

Des mesures objectives pour comprendre

Il est donc important de s’appuyer sur des mesures objectives pour analyser le comportement d’une maison passive.

C’est ce qu’a fait le PHI lors de ses premières réalisations : les maisons en bande de Hanovre, en Allemagne.

Une vingtaine de maisons toutes identiques, sauf celles aux extrémités, ont été mesurées. Résultat : la consommation réelle s’échelonne de 5 à 30 kWh/m²/an.

Comment expliquer cette dispersion alors que les maisons étaient modélisées pour consommer 15 kWh/m²/an ?

Un seul paramètre change : leurs habitants.

Jeunes couples, personnes âgées, familles présentes de manière ponctuelle ou permanente… Des rythmes, besoins et habitudes très différents.

Mais si on fait la moyenne, on obtient 13 kWh/m²/an : objectif atteint.

Usage et température de confort

La consommation d’une maison passive dépend de la manière dont on l’habite.

Petite histoire : un couple avec deux enfants vivait dans une maison passive. Quand les enfants sont partis, les parents ont eu froid. Les apports internes avaient diminué.

Un aparté sur la température de confort : les campagnes d’économie d’énergie parlent de 19°C.

C’est la température retenue dans les logiciels conventionnels.

Or, les études du PHI montrent que la majorité des gens jugent confortable une température de 20°C.

Donc c’est cette température qui est retenue dans une maison passive.

Pour ceux qui pensent que 20°C ce n’est pas suffisant, sachez que le besoin de température plus élevé vient souvent de :

  • Contrastes de température entre pièces
  • Parois vitrées froides
  • Courants d’air
 

Dans une maison passive, tous ces points sont supprimés. 20°C est donc généralement largement suffisant.

Apports, pertes et besoins réels

Regardons deux graphiques générés par le PHPP :

  • Le premier montre que le besoin de chauffage se concentre sur 4 mois de l’année.
  • Le second montre les pertes et les apports. L’apport solaire représente les deux tiers des apports.
 

Un point très intéressant :

  • Besoins de chauffage : 9,5 kWh/m²/an
  • Apports internes : 13,3 kWh/m²/an
 

Donc les usages des habitants ont un impact majeur.

Une famille qui cuisine longuement aura plus d’apports internes que celle qui réchauffe au micro-ondes.

L’utilisation de matériel électrique joue aussi : regardez la photo d’une box en caméra thermique…

Enfin, les apports non utiles (chaleur excédentaire) peuvent être stockés dans des parois lourdes grâce à l’inertie thermique.

Le PHPP le prévoit, mais de manière simplifiée. Pour aller plus loin, il faut faire appel à des bureaux d’étude thermique et des simulations dynamiques.

Conclusion : comment se chauffer ?

Les besoins de chauffage, même faibles, dépendent énormément de la manière de vivre dans la maison passive.

Il est donc impossible de définir précisément les apports complémentaires à prévoir.

Mais pas de panique : la puissance maximale nécessaire est très faible :

  • 10 W/m²
  • Soit environ 1500 W pour une maison de 150 m²
 

C’est la puissance d’une bouilloire, d’un grille-pain ou d’un sèche-cheveux.

Vous aurez largement de quoi chauffer sans investir dans un système coûteux.

Oubliez donc les pompes à chaleur et les planchers chauffants.

Voilà, c’est la fin de la première partie.

Dans la deuxième partie, nous verrons concrètement comment on se chauffe dans une maison passive.