
Se poser la question du coût d’une maison passive est parfaitement légitime.
Si vous êtes devant cette vidéo, c’est que vous commencez à vous intéresser à ce concept, mais que vous vous demandez s’il est réellement pertinent pour votre projet.
Je vais tenter de vous donner quelques éléments pour vous aider à vous décider. On va tout d’abord s’intéresser aux référentiels usuels des prix de la construction pour ensuite voir si c’est intéressant à utiliser dans le cadre d’une construction passive. Et enfin, on parlera de la rentabilité d’un investissement dans ce mode constructif.
On me demande souvent, assez naïvement : quel est le prix au m² d’une maison passive ?
Alors j’apporte systématiquement la même réponse : quel est le prix d’une voiture ?
Alors je parle d’une maison simple, un classique, mais on grand luxe ? Ben moi aussi, une voiture avec quatre roues, un volant, un moteur et des portières pour y rentrer.
Le référentiel des coûts de la construction n’est pas du tout partagé, alors que le référentiel des prix des voitures est beaucoup plus connu. Et c’est en cela qu’il est intéressant pour le comparer au prix d’une maison.
Comme pour une maison, quand vous voulez acheter une voiture :
Vous faites partie d’un budget, soit celui qui vous semble raisonnable, soit le biais maximum que vous pouvez y consacrer.
En fonction de ce budget, vous définissez vos besoins : le type de véhicule, sa taille, la performance de son moteur, sa consommation désirée, le nombre de portes, etc.
Mais vous savez pertinemment qu’il existe différentes marques de voitures, et que même dans chaque marque :
Il y a plusieurs gammes.
Vous allez vous intéresser à certaines en fonction des critères que vous avez définis.
Vous savez très bien que :
Les marques d’entrée de gamme sont plutôt optimisées sur leurs coûts.
Ce sont plutôt les moins chères.
Ce ne sont ni les plus rapides, ni les plus économes, ni les plus fiables, ni celles qui ont le plus d’accessoires, ni les derniers looks à la mode.
Si vos critères sont différents, vous allez regarder d’autres marques :
Par exemple les marques allemandes, si vous recherchez un meilleur confort, une meilleure fiabilité, ou un meilleur service.
Ou alors les marques italiennes, pour leur aspect ou les performances plus sportives.
Les coûts de ces voitures peuvent être très différents, du simple au triple par exemple.
Mais elles ont toutes une ou deux places, et deux volants, et il ne vous viendrait pas à l’idée de les comparer entre elles en calculant le prix à la place assise ou le prix au mètre carré qui roule.
De la même façon, il ne viendrait à l’idée de personne de rechercher la voiture la plus grande possible pour son budget, sinon tout le monde roulerait en minibus.
Pour continuer le parallèle entre l’industrie automobile et la construction :
On peut comparer les maisons de promoteurs immobiliers aux voitures d’entrée de gamme : optimisées essentiellement sur le coût, dans une logique quasi-industrielle, produites en grande quantité, avec les matériaux et la main d’œuvre les moins chers.
Ensuite, on peut comparer les maisons de constructeurs aux voitures des marques de milieu de gamme : un catalogue avec des constructions plus ou moins prestigieuses et différentes options.
Puis, les maisons très haut de gamme peuvent être assimilées aux marques de prestige.
Les maisons passives nécessitent :
Une démarche architecturale,
Une conception technique,
Des calculs précis.
Elles seront donc plutôt assimilées aux maisons d’architectes, c’est-à-dire à des maisons sur mesure. Et c’est bien par rapport à ces maisons qu’il faut comparer le surcoût du passif.
Imaginez que vous alliez chez un constructeur automobile pour lui demander de vous donner le prix de la voiture que vous avez vous-même dessinée :
Avec vos propres performances,
Avec les matériaux que vous avez choisis,
Les accessoires…
Pensez-vous réellement qu’il soit capable de vous chiffrer rapidement votre voiture, et que le prix sera comparable à ce que vous connaissez déjà ? Ce sera le prix d’un prototype, donc ça n’a pas de prix.
Une maison d’architecte – et encore plus une maison passive – c’est un prototype. Imaginer donner a priori le coût moyen des maisons passives n’a donc pas de sens.
Ceux qui le font sans précaution :
Soit ne savent absolument pas de quoi ils parlent,
Soit savent pertinemment que le coût final sera très différent de ce qu’ils annoncent,
Et donc ne garantissent pas la réussite de votre projet.
Ils vous font prendre des risques. Un prix au mètre carré moyen nie toute la dimension architecturale.
Cela reviendrait à dire que, pour la même surface, deux maisons radicalement différentes devraient coûter le même prix. Alors que de nombreux coûts ne dépendent pas de la surface habitable :
La compacité de la maison,
Le type de mur ou de toitures,
Les équipements techniques…
C’est nier que les éléments architecturaux et techniques ont un impact sur le coût.
Et enfin, de nombreux autres éléments entrent en jeu :
Le climat,
La qualité du terrain,
Son accès ou sa pente.
Il est donc nécessaire d’avoir une approche globale de l’ensemble des contraintes et des coûts de la construction et des options possibles sur le programme :
Soit pour faire un budget précis d’une maison,
Soit pour cadrer le programme en fonction du budget.
Et en fait, il n’y a qu’un seul interlocuteur qui peut avoir cette vision d’ensemble : c’est l’architecte.
Le budget d’un projet de maison passive ne peut donc se faire qu’avec l’étude d’un architecte :
Habitué à ce type de construction,
Encore mieux, certifié concepteur de maisons passives.
Seule cette étude pourra donner le coût et la rentabilité d’un tel investissement.
Alors, est-ce qu’une maison passive, c’est rentable ? Bah oui, non, la réponse n’est pas simple.
Réussir une maison passive, c’est optimiser tout un ensemble de postes :
Dont certains sont peu coûteux,
Et d’autres peuvent l’être énormément.
Il y a un niveau de performance à atteindre qui peut s’avérer être prohibitif dans certains cas particuliers.
J’ai le souvenir par exemple d’une maison passive avec un patio vitré intérieur.
Le coût de ce patio a été énorme et même déraisonnable, car il a fallu augmenter les performances de tous les autres éléments techniques pour compenser les pertes de cet élément architectural.
Ceci étant déjà très optimisé, il ne restait plus beaucoup de performances à gagner, ou alors à un coût qui devenait exponentiel.
Mais malgré cela, on peut calculer si le surcoût pour passer de la contrainte réglementaire à la performance passive est rentable. Il faut estimer, par des calculs actuariels un petit peu complexes, la valeur actuelle du surcoût pour être passif.
En effet, la durée de vie des différents investissements n’est pas identique :
L’isolation peut s’amortir sur 50 ans,
Les menuiseries sur 20 à 30 ans,
La ventilation ou chauffage sur 12 ans, par exemple.
On calcule donc :
Le coût de ces investissements,
Leur amortissement,
Leur valeur résiduelle sur la durée d’un prêt.
C’est logique, puisque je vais financer ce surcoût par un prêt immobilier, par exemple sur 20 ou 25 ans.
Ensuite, on regarde si ce montant, divisé par le nombre de kilowattheures qu’on va économiser sur la durée du prêt, est inférieur au coût actuel de l’énergie.
C’est-à-dire que :
Si j’ai investi pour être passif, je vais économiser une certaine quantité d’énergie.
Si je divise la valeur de cet investissement par la quantité d’énergie économisée, j’obtiens le prix du kilowattheure économisé.
Si ce prix est inférieur au prix de l’énergie actuelle, alors c’est un investissement rentable.
Puisque économiser l’énergie me coûtera moins cher que de la dépenser.
En fait, je vais remplacer une partie de ma facture future d’énergie par un remboursement plus important de prêt immobilier.
Je ne dépenserai donc pas plus par mois.
Vous trouverez une démonstration plus détaillée de cet exemple dans une vidéo dont je mets le lien dans les commentaires.
Ce qui est intéressant dans ce calcul, c’est qu’on se compare au prix de l’énergie aujourd’hui.
C’est-à-dire que je ne parie pas sur une hausse de l’énergie dans le futur pour calculer la rentabilité.
En effet :
Rien ne garantit qu’elle va augmenter.
Elle pourrait même diminuer.
Donc si c’est rentable, c’est qu’au total ça ne va pas me coûter plus cher. Mais en faisant cet investissement, j’obtiens gratuitement beaucoup d’autres avantages.
Ce qui est intéressant dans ce calcul, c’est qu’on se compare au prix de l’énergie aujourd’hui.
C’est-à-dire que je ne parie pas sur une hausse de l’énergie dans le futur pour calculer la rentabilité.
En effet :
Rien ne garantit qu’elle va augmenter.
Elle pourrait même diminuer.
Donc si c’est rentable, c’est qu’au total ça ne va pas me coûter plus cher. Mais en faisant cet investissement, j’obtiens gratuitement beaucoup d’autres avantages.
Une maison bien plus confortable
En effet, une maison passive ayant très peu de déperdition, la température est identique partout.
Une empreinte carbone plus faible
Et ça, c’est gratuit.
Moi, je trouve parfaitement injuste qu’on fasse payer une plus-value à ceux qui essayent de faire les choses correctement vis-à-vis de la société.
Faire attention à son empreinte carbone ne devrait donc pas être payant.
Une maison de meilleure qualité
Atteindre cet objectif ne peut se faire qu’au prix d’une mise en œuvre et de matériaux de meilleure qualité.
Une meilleure valeur patrimoniale
Puisqu’elle consomme très peu, elle vaut donc plus cher.
L’impact du diagnostic performance énergétique (DPE) devient de plus en plus important dans le prix de revente d’un bien immobilier.
Protection contre les hausses de prix de l’énergie
Si l’énergie, comme c’est fortement probable, augmente fortement dans le futur, l’impact financier sera beaucoup plus faible pour les maisons passives.
En conclusion :
Essayer de trouver un coût au mètre carré pour la construction de maisons passives n’a aucun sens.
Cela ne permet pas de se décider.
Il faut avoir une approche globale sur un budget complet pour se rendre compte que le surcoût de la construction passive est plutôt faible.
Il est habituellement de quelques pourcents sur le budget complet. Et il est le plus souvent rentable à long terme.
Ce n’est donc pas un critère de décision. La vraie question à se poser est de savoir si vous êtes convaincu par la pertinence de ce mode constructif et si vous êtes prêt à vous y adapter pour le réussir.