
Pour réussir la conception d’un bâtiment passif, il est impératif de respecter un ensemble de principes de base. Ils ne sont pas obligatoires pour être certifié, mais ils sont incontournables pour atteindre la performance désirée.
La construction passive recommande un certain nombre de valeurs à atteindre en fonction des différentes zones climatiques.Nous allons nous intéresser aux principes qui sont adaptés à notre propre zone, c’est-à-dire l’Europe continentale tempérée.
Il y a trois types de parois opaques :
les murs
la toiture
la dalle de sol
Toutes ces parois doivent être optimisées pour limiter les déperditions thermiques. On mesure la performance d’une paroi par sa conductivité thermique, que l’on note habituellement U, et qui s’exprime en watts par mètre carré kelvin.
Cela représente la quantité d’énergie qui traverse un mètre carré de paroi pour une différence de température entre l’intérieur et l’extérieur de 1 kelvin (ou 1 degré).
👉 Plus la valeur U est faible, plus la paroi est performante.
La valeur minimum recommandée pour la construction passive est de 0,15 W/m².K, quelles que soient les parois. Si la paroi n’était constituée que d’un seul isolant, cela représenterait environ 26 cm d’épaisseur, mais une paroi est composée habituellement de plusieurs couches de matériaux différents.
Il faut donc calculer la valeur de la conductivité thermique en composant tous les éléments entre eux. Voici l’exemple d’un mur en ossature bois qui respecte cette performance.
En pratique, on dépasse souvent cet indicateur, notamment pour la toiture et les murs. En effet, il n’est pas rare, par exemple, d’avoir des toitures qui atteignent jusqu’à 0,10 W/m².K.
Je reviendrai sur le calcul détaillé de la conductivité thermique dans une autre vidéo si ça vous intéresse.
Un bâtiment perd aussi de l’énergie par toutes les jonctions entre les différents éléments de la construction. Par exemple :
une poutre qui traverse un mur
un balcon
la liaison entre le mur et la dalle de sol
les angles entre les murs
Le cas classique, c’est la liaison entre les murs et la dalle de sol. Très souvent, les murs sont isolés par l’intérieur, et la dalle de sol est isolée en sous-face, donc par l’extérieur. Il n’y a donc pas de continuité d’isolant, et donc de fortes pertes par la partie non isolée.
👉 Les ponts thermiques sont une source importante de pertes thermiques.
Il est donc impératif :
de tous les identifier
de les calculer
de vérifier qu’ils ne dégradent pas trop la performance finale
L’indicateur qui mesure un pont thermique s’appelle la valeur Ψ (psi). Comme pour la valeur U d’une paroi, la valeur Ψ représente la quantité d’énergie perdue par mètre linéaire de pont thermique pour une différence de 1 degré.
Elle s’exprime en watts par mètre kelvin (W/m.K).
👉 Et comme la valeur U, plus elle est faible, meilleur est le pont thermique.
En passif, la valeur cible est d’être en dessous de 0,01 W/m.K, ce qui est très très faible.
C’est souvent sur les ponts thermiques qu’il y a les plus grands efforts à faire — et donc les plus grandes difficultés en conception.
Les menuiseries sont des composants essentiels de la performance d’une maison passive.
Elles sont à la fois :
source de pertes (le verre est un matériau très conducteur)
source principale d’apport en énergie (parce qu’elles sont transparentes et maximisent les apports solaires)
Elles doivent être correctement orientées, c’est-à-dire :
en majorité vers le sud
un peu vers l’est
un peu vers l’ouest
très peu vers le nord, si c’est possible
Elles doivent avoir des performances de conductivité thermique très élevées. Une menuiserie classique a une valeur U — c’est le même indicateur que pour les murs — de 1,5 W/m².K.
👉 C’est dix fois plus que la valeur recommandée pour les murs.
Prenons une maison de 100 m², un carré de 10 par 10 sur un seul étage. Elle a :
100 m² de murs (4 façades de 10 m de long et 2,5 m de haut)
Imaginons que 25 % de la surface habitable est vitrée (soit 25 m² de menuiserie).
Il reste donc 75 m² de parois opaques.
Or, il passe dix fois plus d’énergie par m² de menuiserie que par m² de mur.
Donc les menuiseries vont perdre 10 / 3 = 3,3 fois plus d’énergie que les murs.
👉 Pour limiter les pertes, ce sont bien les menuiseries sur lesquelles il faut se concentrer.
La valeur cible en maison passive est de 0,8 W/m².K, soit environ la moitié des menuiseries classiques.
De plus, le vitrage doit laisser passer correctement les UV, avec un indice de transmission solaire g > 0,50.
Cet indicateur g représente la quantité d’énergie transmise à l’intérieur par rapport à l’énergie reçue sur le vitrage.
Mais attention, avoir de bons vitrages et de bonnes menuiseries ne suffit pas :
👉 Il faut qu’elles soient correctement posées, en limitant une fois de plus les ponts thermiques.
Elles sont reliées au bâti, donc la méthode de pose est primordiale pour exploiter pleinement leur performance.
Vous comprendrez donc que des menuiseries performantes, avec les vitrages les plus transparents possible, et une pose rigoureuse impliquent nécessairement un coût beaucoup plus élevé.
👉 Les menuiseries performantes sont le principal investissement pour rendre une maison passive.
La qualité de l’étanchéité à l’air se mesure par le test de la porte soufflante. On met le bâtiment en surpression ou en dépression avec une différence de pression de 50 pascals avec l’extérieur.
On mesure la quantité d’air qui s’échappe par toutes les fuites, c’est-à-dire le volume d’air qu’il faut renouveler toutes les heures pour compenser ces fuites.
👉 L’objectif est d’atteindre au minimum 0,6 volume par heure.
Plus cet indicateur est faible, moins il y a de fuites non maîtrisées.
Il représente en fait la qualité de la mise en œuvre de l’étanchéité à l’air, notamment :
la pose du frein vapeur
l’étanchéité de toutes les jonctions
Ce point est très technique, il ne se voit pas, mais il est primordial.
0,6 volume par heure pour une dépression de 50 pascals représente ce que la maison perd un jour de vent moyen.
C’est plus que le volume d’air renouvelé par la ventilation.
Or, l’air qui rentre par ces fuites arrive à la température extérieure, donc il faut le réchauffer fortement en hiver.
Il fait 20°C à l’intérieur, mais 0°C à l’extérieur :
il faut réchauffer cet air de 20°C
alors que l’air qui rentre par la ventilation double flux sera à environ 18°C
il faut donc réchauffer cet air seulement de 2°C
👉 Il faut dix fois plus d’énergie pour réchauffer l’air issu des fuites que l’air issu de la VMC double flux.
Le dernier principe impose une ventilation double flux pour le renouvellement de l’air de façon contrôlée.
Le principe est simple :
réchauffer l’air entrant (froid)
par l’air extrait de l’intérieur (chaud)
On fait croiser les deux flux dans un échangeur, ce qui permet de récupérer l’essentiel des calories contenues dans l’air vicié.
Cette ventilation doit :
avoir un rendement d’au moins 75 %
consommer très peu d’énergie
👉 Ce point est très technique et nécessite de vraies compétences en ventilation et en réseau de distribution.
On ne les trouve que chez un spécialiste.
C’est donc le composant le plus technique, mais il reste relativement simple : des ventilateurs et un échangeur fixe.
C’est un composant fiable, avec une grande durée de vie s’il est bien entretenu.
Enfin, n’oublions pas que cette ventilation peut aussi servir à véhiculer le peu de chaleur nécessaire au chauffage, via une batterie chaude (échangeur thermique) :
résistance
réseau géothermique
puits canadien
Le respect des principes que nous venons de voir est un point de départ incontournable pour une conception réussie.
S’il est possible, sur le papier, de ne pas respecter l’un de ces points, cela complique énormément la conception.
👉 Tous ces éléments sont déjà extrêmement optimisés.
Il sera donc très dur de compenser un critère non respecté par une performance supplémentaire ailleurs.
Les valeurs proposées ici ont été calculées pour offrir le meilleur rapport coût/performance.
Donc, ne pas atteindre un des objectifs génèrera à coup sûr un surcoût important sur les autres points.
Par exemple, ne mettre que du double vitrage provoquera un besoin de sur-isolation de l’ensemble des parois, et ce coût sera largement supérieur à l’économie réalisée sur les vitrages.
👉 Réaliser une maison passive repose sur :
une bonne conception
les bons matériaux
une bonne réalisation
On ne se repose pas sur une technologie coûteuse ou compliquée à mettre en œuvre, et très vite obsolète.
La preuve : ces principes, qui datent des années 80, sont encore d’actualité après plus de 30 ans.
Cette vidéo aborde de façon rapide les différents principes à mettre en œuvre.
👉 Vous trouverez dans les vidéos et articles complémentaires beaucoup plus de détails sur chacun de ces points. N’hésitez pas à les consulter.